Jeudi 10 et vendredi 11 mai 2012, Palais des Congrès de Montréal
Colloque présenté par l'équipe de recherche Sexualités et genres : vulnérabilité, résilience (SVR), dans le cadre de la 80e édition du Congrès de l'Association francophone pour le savoir (ACFAS 2012).
En collaboration avec la Chaire de recherche sur l'homophobie
Description : Ce colloque propose une exploration multidisciplinaire des thèmes actuels en recherche concernant les enjeux vécus par les jeunes de minorités sexuelles. L’expression « minorité sexuelle » réfère ici à toute personne de 14 à 30 ans, qui s’identifie comme lesbienne, gai, bisexuelle, transsexuelle/transgenre, intersexuelle, queer, en questionnement, qui est issue d’une famille homoparentale, ou perçue comme différente en raison de son expression de genre ou de son association avec des individus de minorités sexuelles. Les problématiques touchant cette population relèvent d’enjeux et de défis spécifiques liés à la fois à l’appartenance à un groupe d’âge, en transition depuis l’adolescence jusqu’à l’âge adulte, et à une cohorte générationnelle distincte des précédentes par les contextes juridiques, sociaux et culturels dans lesquels elle vit. L’exploration proposée sera faite en abordant cinq grands thèmes de recherche, soit (a) Les enjeux familiaux et personnels (incluant le coming out et les contextes de familles homoparentales), (b) Transsexualité, transgenrisme et intersexualité, (c) Les enjeux de santé, (d) Le milieu scolaire, et (e) Les nouveaux territoires. Ce dernier thème inclura différents thèmes moins conventionnels tels l’utilisation des espaces queers et les enjeux touchant les athlètes lesbiennes, gais et bisexuel(le)s.
Responsables : Dominic BEAULIEU-PRÉVOST (Université du Québec à Montréal), Line CHAMBERLAND (Université du Québec à Montréal), Julie PODMORE (John Abbott College)
Session II - Transsexualité, transgenrisme et intersexualité
Jeudi 10 Mai 2012, 13h30 – 16h15
Présidence et animation : Julie PODMORE (John Abbott College)
Au-delà de la transphobie : les ados trans, l’école et le droit à l’invisibilité
Auteur·e·s : Francoise SUSSET (Université de Sherbrooke)
Résumé : Il existe un risque significatif que les revendications visant l’acceptation d’une diversité d’expression et d’identification de genre ne tiennent pas compte des besoins de bon nombre de jeunes trans qui s’identifient plus conventionnellement comme appartenant à « l’autre sexe». De manière générale, ces jeunes ne se sentent pas concernés par les débats portant sur la diversité des représentations de genre; leur but se résume plutôt à appartenir de façon convaincante et conventionnelle à l’un des deux genres et non à les remettre en question de quelque manière que ce soit. Si notre objectif est d’inclure le soutien à ce groupe de jeunes trans, il semble important de reconnaître le besoin d’invisibilité recherché par ces jeunes dont l’objectif est l’intégration au groupe correspondant à leur identité de genre. De leur côté, les écoles ne peuvent ignorer les besoins de ces jeunes, car leur quête d’expression identitaire correspond à une réalité médicale pour l’instant incontournable qui confère le droit à la confidentialité. Afin de comprendre comment faire face à leurs obligations envers ces jeunes, les milieux scolaires sont donc contraints à s’ouvrir à la complexité des représentations de genre et de manière plus générale aux besoins de tous les groupes de jeunes des minorités sexuelles.
La représentation de l’expérience trans à l’écran français : L’ordre des mots et Tomboy
Auteur·e·s : Julianne PIDDUCK (Université de Montréal)
Résumé : Cette communication explore la représentation de l’expérience trans dans deux long-métrages français récents, L’ordre des mots (Mélissa et Cynthia Arra, 2007) et Tomboy (Céline Sciamma, 2011). Dans un premier temps, nous discuterons le documentaire indépendant des sœurs Arra, le premier long-métrage militant associé au mouvement trans français. Structuré autour de six témoignages de personnes s’identifiant comme trans ou intersexe, le titre du film souligne une préoccupation linguistique, où les sujets abordent la question difficile de nomenclature dans un univers culturel et linguistique binaire. Dans un deuxième temps, nous analyserons la fiction récente Tomboy. Dans la foulée de Ma Vie en Rose (1997), ce film d’auteur présente le « trouble identitaire » de Laure, une jeune fille qui, selon la rubrique du film, « devient Michael, un garçon comme les autres ». Tomboy aborde le « trouble de genre » dans l’univers restreint et fluide des enfants, alors que L’ordre des mots fait face d’une manière frontale à la violence du système binaire de genre dans un contexte français. En contrastant ces deux films provenant de milieux de production très différents, ainsi que leur réception, nous analyserons certaines dynamiques de la représentation culturelle de l’expérience trans en France.
Quand naître ne rime pas avec apparaître au monde : les répercussions du processus d’invisibilisation des corps sexués « ambigus » sur les jeunes personnes intersexuées
Auteur·e·s : Lucie GOSSELIN (Université Laval), Janik BASTIEN CHARLEBOIS (Université du Québec à Montréal)
Résumé : Cette communication porte sur un sujet peu développé dans le monde de la recherche francophone, soit l’intersexualité. Elle se propose de faire un tour d’horizon des obstacles spécifiques auxquels sont confrontées les personnes intersexuées pendant leur jeunesse, dont la violence, la solitude, les traitements imposés par le système biomédical, l’impossibilité de s’identifier aux catégories de sexe en cours de même qu'à un groupe de pairs. Ces obstacles ont été identifiés grâce aux données recueillies par la technique du récit de vie et l'analyse d'écrits militants dans le cadre d'une recherche de type exploratoire effectuée par Lucie Gosselin pour l’obtention d’un diplôme de maîtrise en anthropologie, auxquelles s'ajoute une recension des écrits mise à jour. Elle met en relief les mécanismes, contradictions et effets de l’appareil d’intervention sur les corps de personnes intersexuées, principalement ceux reliés à l’exercice du pouvoir du système biomédical. L’intense résistance à ce qui brouille les certitudes du modèle binaire des sexes se traduit par une persistance renouvelée en la croyance d’une vérité du sexe (Fausto-Sterling, 2000), qui est soutenue par le silence du tabou. Alors que l’ensemble de ce processus d’invisibilisation se déploie sous la justification du « propre bien » des personnes intersexuées, l’écoute de la parole des personnes militantes intersexuées nous fournit d'autres perspectives.